SÉNATUS-CONSULTES SUR LES AQUEDUCS
  
( 11 av. J.-C. )
 
Hubert Robert (1733-1808), Le pont du Gard, 1787, Paris, Musée du Louvre.
 

 
P. Grimal, Frontin, Les aqueducs de la ville de Rome, Paris, 1944, pp. 60-64 ).
 

 
SC de aquaeductibus 126.
   Le plus souvent, les dégâts proviennent des agissements coupables des propriétaires riverains qui endommagent les conduits de plusieurs façons. D'abord, ils occupent avec des bâtiments ou des arbres les zones qui, conformément à un sénatus-consulte, doivent rester libres autour des aqueducs. Les arbres sont les plus nuisibles ; leurs racines font éclater les voûtes et les murs latéraux. Puis, ils font passer des chemins vicinaux et des sentiers au travers des canalisations elles-mêmes. Finalement, ils interdisent l'accès pour l'entretien. Tous ces délits sont prévus par le sénatus-consulte que je donne ci-après.
SC de aquaeductibus 127.
   « Entendu le rapport des consuls Q. Aelius Tubero et Paulus Fabius Maximus selon lequel le trajet des aqueducs venant à la ville est obstrué par des tombeaux et des constructions et planté d'arbres, et les consuls ayant demandé au Sénat son avis sur ce sujet, la décision suivante a été prise :
  
espace libre à l'entour et que l'on ne mette rien auprès d'eux qui gêne l'adduction et dégrade les ouvrages appartenant à l'Etat, il est décidé que, autour des sources, des arches et des murs, de part et d'autre 15 pieds devront être laissés libres et que, autour des canaux souterrains à l'intérieur de la ville et des immeubles y attenant et hors de la ville, de part et d'autre, on devra laisser libre un espace de 15 pieds sans qu'il soit permis dorénavant d'élever sur cette zone ni tombeau ni construction ni d'y planter d'arbres. S'il y avait maintenant des arbres à l'intérieur de cette zone, ils devront être abattus sauf s'ils touchent à une exploitation agricole et s'ils sont compris dans des constructions. Toute infraction entraînera, pour chaque contravention, une amende de 10 000 sesterces, dont la moitié sera donnée en récompense à l'accusateur qui aura été l'agent principal de la condamnation de celui qui aura transgressé ce sénatus-consulte, et l'autre moitié sera encaissée par le Trésor. Les curateurs des eaux connaîtront des affaires de cet ordre et les jugeront. »
SC de aquaeductibus 128.
   Ce sénatus-consulte pourrait paraître tout à fait équitable même si l'on ne réclamait ces terrains qu'au seul point de vue de l'intérêt général ; il l'est bien plus encore puisque nos ancêtres, avec une admirable équité, n'enlevaient pas aux particuliers les terrains même qui étaient d'utilité publique, mais, lorsqu'ils construisaient les aqueducs, si un propriétaire faisait une difficulté, pour vendre une parcelle, ils lui payaient la totalité du champ, et, après avoir délimité le terrain nécessaire, ils lui revendaient le champ afin que, dans leurs limites, le domaine public et le domaine privé eussent chacun leurs pleins droits.
   Beaucoup, cependant, non contents d'avoir envahi ce terrain, ont porté la main sur le conduit lui-même et, en perçant les parois, <un peu partout détournent de l'eau, aussi bien ceux qui> eu ont reçu la concession que ceux qui, ne se donnant pas le mal, bien léger, d'en demander une, profitent de l'occasion pour s'emparer par la force <de l'eau publique>. Et qu'arriverait-il si tous ces délits n'étaient pas réprimés par une loi très bien conçue et si de sérieuses sanctions n'étaient pas prévues contre les récalcitrants ? Aussi je donne ci-dessous le texte de cette loi.
SC de aquaeductibus 129.
   «Le consul T. Quinctius Crispinus a fait au peuple une proposition de loi régulière et le peuple a voté régulièrement au Forum devant les rostres du temple du divin Julius, la veille des Calendes de Juillet. La tribu Sergia a commencé le vote. Pour la tribu, Sex [...], fils de Lucius, Virro, a voté le premier.
   « Quiconque, après le vote de cette loi, aura sciemment et par manceuvres frauduleuses percé, rompu, fait percer ou fait rompre ou détérioré des canaux, conduits, arches, tuyaux, tubes, châteaux d'eau, bassins des aqueducs publics amenés à la ville, empêchant que tous ou l'un de ces aqueducs puisse aller à la ville de Rome, s'y déverser, y couler, y parvenir, y être amené ou que l'eau ne jaillisse, ne soit distribuée, répartie, amenée dans les châteaux d'eau et les bassins dans la ville de Rome et dans les lieux et édifices qui sont ou seront adjacents à la ville, dans les jardins, biens-fonds et terrains, jardins, biens-fonds et terrains aux propriétaires ou usufruitiers desquels de l'eau a été ou sera concédée ou attribuée, que le coupable soit condamné à payer au peuple Romain 100 000 sesterces.
   « Quel que soit celui de ces dommages qu'il ait causé, qu'il soit condamné à réparer, restaurer, remettre en état, reconstruire, installer et démolir rapidement, sans manoeuvre frauduleuse; et pour la répression de tous ces délits par amende, que quiconque est ou sera curateur des eaux et, si personne n'est curateur des eaux, que le préteur chargé de la justice entre citoyens et pérégrins contraigne et poursuivre les contrevenants par amende et prise de caution, et que le curateur, ou, s'il n'y a pas de curateur, que le préteur de ce nom ait droit et pouvoir de prendre des cautions.
   « Si un esclave commet l'un de ces délits, que son maître soit condamné à payer 100 000 sesterces au Peuple Romain. »
 


 
►  Sources : Plusieurs manuscrits dont un du XIIe s. ( Codex Cassinensis ).