PROPOSITION DE LOI DU TRIBUN C. CORNÉLIUS
  
VISANT LES PRÉTEURS CORROMPUS
  
( 67 av. J.-C. )


     
Dion Cassius, XXXVI, 38 ( Gros, Paris, 1845-70 ).
  

 
Telle fut la loi de Cornelius à ce sujet : il en proposa une autre que je vais faire connaître. Tous les préteurs consignaient, dans un édit qu'ils affichaient, les principes d'après lesquels ils devaient rendre la justice ; mais ils ne donnaient point toutes les formules qui avaient été établies au sujet des contrats. De plus, ils ne composaient point cet édit tout d'une fois, et ils n'observaient pas ce qu'ils avaient écrit : souvent même ils le changeaient, et la plupart du temps c'était, comme cela devait arriver, par bienveillance ou même par haine pour certaines personnes. Cornelius proposa donc une loi en vertu de laquelle les préteurs seraient tenus de faire connaître, aussitôt qu'ils entreraient en charge, d'après quelles règles ils rendraient la justice, et de ne s'en écarter jamais. En un mot, les Romains, à cette époque, se montrèrent si soucieux de réprimer la corruption, qu'ils établirent des peines contre ceux qui s'en rendraient coupables et des honneurs pour leurs accusateurs. Ainsi, quoique Caïus Carbon n'eût été que tribun du peuple, on lui décerna les honneurs consulaires, parce qu'il avait mis en accusation M. Cotta, qui avait destitué le questeur Publius Oppius soupçonné de se laisser corrompre et d'ourdir des trames criminelles, mais qui s'était enrichi, lui-même en Bithynie. Plus tard Carbon eut aussi le gouvernement de cette province et n'y commit pas moins d'exactions que Cotta : il fut accusé par le fils de celui-ci et condamné à son tour ; car pour certains hommes il est plus facile de blâmer les autres que de se corriger eux-mêmes. Ils sont très prompts à faire ce qui leur paraît mériter d'être puni dans autrui ; et s'ils condamnent le mal chez les autres, ce n'est pas une raison pour qu'on croie qu'ils l'ont en aversion.