ÉDIT DE JUSTINIEN PORTANT RÉFORME DE L'ACTION « REI UXORIAE »
  
( 530 apr. J.-C. )
 

 
A. Levet, E. Perrot & A. Fliniaux, Textes et documents.., Paris, 1931, pp. 41-45, n. 47 ).
 

 
Nous entreprenons maintenant une réforme qui n'est pas de peu d'importance, elle s'étend sur presque tout le corps du droit ; elle a pour objet les actions rei uxoriae et ex stipulatu. Supprimant les points communs et les points dissemblables qui existent entre ces actions, nous renfermons dans le seul canal de l'action ex stipulatu toutes les règles de l'action rei uxoriae que nous jugeons dignes d'avoir force de loi. 1. Nous ordonnons donc, l'action rei uxoriae étant abrogée, que toutes les dots soient réclamées par l'action ex stipulatu, soit qu'il y ait eu ou non acte écrit de stipulation, la stipulation étant en fait considérée comme ayant eu lieu. 1 a. Il en est de même, quoique la stipulation ait été nulle, car il faut plutôt l'aider que la détruire ; et de fait, si une stipulation valable rencontrée dans un titre donne force à celles qui sont nulles, pourquoi notre constitution ne donnerait-elle pas force légale à de semblables stipulations ? Il est en effet logique, si nous décrétons que la stipulation sera censée avoir eu lieu, même lorsqu'on n'y aura pas procédé, que, à plus forte raison, nous validions la stipulation nulle. b. Et, pour mieux protéger les dots, de même que nous admettons l'existence d'hypothèques tacites dans l'administration des biens pupillaires, et dans beaucoup d'autres branches du droit, de même dans cette action nous accordons une hypothèque de part et d'autre, du côté du mari pour la restitution de la dot, du côté de la femme pour la prestation de la dot ou pour la garantie contre l'éviction des biens dotaux, soit que ces parties intéressées en première ligne aient elles-mêmes transféré, promis ou reçu la dot, soit que d'autres personnes l'aient fait pour eux, et que la dot, selon la dénomination du droit ancien, soit adventice ou profectice... 1 d. Qu'on se garde de penser que ces dispositions sont établies seulement pour les dots au sujet desquelles des titres écrits ont été rédigés ; car, lors même que la dot serait transférée, promise ou reçue sans écrit, il n'y a aucun obstacle à ce que la stipulation soit censée faite et jouisse de part et d'autre d'une hypothèque, comme s'il y avait eu écrit. Que telle soit la nature de l'action ex stipulatu, l'action rei uxoriae disparaissant à l'avenir. 2. Mais, bien que nous n'ignorions pas que l'action ex stipulatu a son fondement dans le droit strict, et ne tire pas son origine de la bonne foi, néanmoins, puisque la stipulation de dot trouve une nouvelle nature, on lui adaptera aussi l'avantage de la bonne foi, provenant de l'action rei uxoriae... 3 a. On doit donc savoir que l'édit prétorien de alterutro ne joue pas sur l'action ex stipulatu, la femme pourra ainsi poursuivre sa dot, en même temps que recueillir ce que le mari lui aura laissé, à moins que le mari ne l'ait laissé spécialement pour tenir lieu de dot, car il est tout à fait clair que le testateur qui n'a pas ajouté cette clause a voulu que la femme pût poursuivre et la dot et les biens légués... 5. Qu'on n'entende plus parler des inutiles longueurs des rétentions. Quel besoin y a-t-il en effet de faire figurer des rétentions pour inconduite, alors que des constitutions ont introduit d'autres modes de protection ? a. Pour quel motif introduirait-on une rétention pour choses données, alors que le donateur a la possibilité de venir en aide à son droit par une action réelle directe ou utile, ou par une condictio. b. La rétention pour choses soustraites n'est pas davantage nécessaire, puisque l'action rerum amotarum est ouverte à tous les maris. 5 c. Que le silence se fasse sur la rétention pour cause d'enfants, puisqu'un penchant naturel pousse les parents à élever leurs enfants... 5 e. Et la rétention pour cause d'impenses faites sur les biens dotaux ne nous parait pas non plus appropriée... 6. Dans l'action ex stipulatu, il faut sans aucun doute observer cette règle que, si la femme meurt au cours du mariage, la dot ne tourne pas au bénéfice du mari, si ce n'est en vertu de certains pactes, et qu'au contraire l'action ex stipulatu, conformément à sa nature, se transmet aux héritiers de la femme, que la stipulation ait été prononcée, ou qu'elle soit censée exister en vertu de cette constitution. 7. Mais, attendu que sur la réclamation de la dot l'action ex stipulatu exigeait par sa nature que la restitution de la dot par le mari fût immédiate et totale, alors que l'action rei uxoriae accordait trois termes d'un an, deux ans, trois ans pour les choses se déterminant par le poids, le nombre et la mesure, en même temps qu'un paiement non plus total mais proportionné aux facultés du mari, si ce dernier n'avait pas diminué par dol son patrimoine, nous donnons à cet égard à l'action ex stipulatu une physionomie nouvelle ; en sorte qu'à la dissolution du mariage, sans qu'il soit besoin de conclure un pacte, le mari sera condamné à ce qu'il peut fournir, car c'est là une règle tout à fait équitable et exigée par la déférence due au mari... 7 a. Cependant, le paiement de la dot ne se fera pas en trois termes d'un an, deux ans, trois ans ; mais de toute façon, dans l'année, pour les choses mobilières, se mouvant elles-mêmes, ou incorporelles ; toutes autres choses qui tiennent au sol devront être restituées sur-le-champ... 13... Lorsqu'un étranger, quel qu'il fût, transférait une dot, sans faire aucune stipulation ou pacte portant qu'elle lui reviendrait, la femme avait l'action rei uxoriae : règle qui autrefois ne se rencontrait pas dans l'action ex stipulatu ; mais, s'il était intervenu une stipulation ou un pacte, le stipulant ou celui qui faisait le pacte avait l'action civile ex stipulatu ou praescriptis verbis. 13 a. Nous ne voulons pas qu'il en soit ainsi maintenant. Si l'étranger, en transférant la dot, n'a pas stipulé spécialement son retour en sa faveur, ou fait un acte à cet objet, que la femme dans ce cas soit présumée avoir fait elle-même la stipulation et gagne la dot dans un événement de cette sorte. 13 b. Nous ne voulons pas que, dans cette espèce, l'étranger soit censé avoir fait une stipulation tacite, pour éviter que ce que nous avons introduit en faveur des femmes ne se retourne contre elles. Bien mieux, en ces sortes de dots, qui sont transférées ou promises par des étrangers, que la femme elle-même soit censée avoir fait une stipulation tacite, à moins que l'étranger n'ait fait un pacte ou une stipulation exprès, portant que la dot lui serait rendue, car l'étranger qui ne stipule rien est censé avoir voulu donner à la femme plutôt que se réserver un droit... 15 b. Mais de peur que la femme ne consente à une diminution de ses hypothèques, il est nécessaire sous ce rapport de venir au secours des femmes, en ajoutant seulement que le mari non seulement ne pourra engager à titre d'hypothèque le fonds dotal, même du consentement de la femme, mais qu'il ne pourra pas davantage l'aliéner...
 

  
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Source : Code de Justinien, V, 13, 1.