NOVELLE
DE MARCIEN SUR LE MARIAGE DES SÉNATEURS ( 4 avr. 454 apr. J.-C. ) |
( G. Sautel in Histoire des Institutions.., Paris, 1957, pp. 271-274, n. 158 ). |
Les empereurs Valentinien et Marcien, Augustes, à Palladius, préfet du prétoire. |
Les
très sacrées constitutions, qui enserrent la vie de chacun,
doivent être par chacun entendues en sorte que tous, ayant claire
connaissance de leur ordonnance, se détournent des [voies] interdites,
et suivent les [voies] autorisées. Si donc dans ces constitutions
une [disposition] se trouve exprimée avec quelque obscurité,
il est nécessaire qu'elle soit éclairée par l'interprétation
impériale, afin que toute ambiguïté soit bannie de
la loi, et que l'effort respectif des plaideurs ne puisse faire dévier
dans le sens de leur position personnelle des dispositions juridiques
douteuses, et que ceux qui ont à connaître des procès
et siègent dans les tribunaux, s'en tenant à une interprétation
patente des constitutions, ne balancent pas entre des solutions incertaines,
leurs sentences en étant retardées ou vacillantes. La
voie [conduisant] à la sentence s'ouvre, de fait, libre et facile,
dès lors qu'apparaît sans ambiguïté la [règle]
selon laquelle il faut juger. 1. Ta
Magnificence, s'appliquant à garder toujours le droit chemin
de justice dans la solution de tous les procès, a consulté
notre Clémence sur un point d'une constitution de Constantin,
où paraît résider quelque ambiguïté.
De fait, en statuant « qu'il n'était pas permis à
un sénateur, à un perfectissimus, à un
duumvir, à un flamine municipal, à un prêtre du
culte provincial d'avoir pour épouse une ancilla ou
une fille d'ancilla, une affranchie ou une fille d'affranchie –
qu'elle ait été faite [citoyenne] Romaine ou Latine –
une comédienne ou une fille de comédienne, une cabaretière
ou une fille de cabaretière, ou une fille d'entremetteur ou de
gladiateur, ou une femme qui aurait conduit des transactions commerciales
en public », il a encore ajouté à ces personnes
frappées d'exclusion et d'interdiction la personne humilis
et abiecta. D'où, assure ton Eminence, est apparue une
grande hésitation dans les causes matrimoniales [pour savoir]
si ces qualifications devaient être appliquées également
aux femmes ingénues pauvres, et si la disposition de la constitution
les excluait du mariage des sénateurs. Tout à fait étrangère
à la présente époque doit être cette abominable
opinion, que la pauvreté pourrait avoir été attribuée
à quelqu'un à titre de déshonneur, alors que souvent
et pour beaucoup d'hommes des ressources modiques ont largement conduit
à la gloire, et qu'un état de fortune limité a
constitué un témoignage de modération. Qui pourrait
croire que Constantin d'illustre mémoire, lorsqu'il empêchait
que les couches nuptiales des sénateurs fussent souillées
par une lie de femmes corrompues, aurait placé les cadeaux de
la fortune avant les biens naturels, et aurait fait passer après
les richesses – que la variété des sorts peut
aussi bien enlever qu'apporter – l'ingénuité,
qui ne peut être arrachée, dès lors qu'elle est
une fois apparue ? 2. En vérité, ce grand amant de l'honnête et ce très saint censeur des mœurs a considéré qu'étaient des personnes humiles et abiectae, jugées par lui indignes des mariages de sénateurs, celles qu'avait souillées d'une tache l'infamie de leur naissance, ou d'ignobles flétrissures une vie vouée à des gains honteux, et qui avaient été imprégnées soit par la honte de leur origine, soit par l'obscénité de leur profession. Aussi, levant tout le doute qui s'était glissé dans l'esprit de certains, laissant demeurer et durer à toujours dans leur très stable rigueur toutes ces [dispositions] que la constitution de Constantin de divine mémoire a établies sur les mariages des sénateurs, nous jugeons que par femme humilis ou abiecta on n'entend nullement celle qui, bien que pauvre, est née de parents ingénus. Nous décidons qu'il est loisible aux sénateurs et à ceux qui sont pourvus des dignités amplissimes de s'attacher en mariage des femmes nées de [parents] ingénus, encore que pauvres, et qu'il n'y a aucune distinction entre femmes ingénues d'après la richesse et 1'opulence de la fortune. 3. Nous estimons que sont des personnes humiles et abiectae les seules femmes que la constitution susdite, en les énumérant et les désignant individuellement, n'admet pas à s'unir en mariage avec les sénateurs : à savoir l'ancilla, la fille de l'ancilla, l'affranchie, la fille de l'affranchie – qu'elle ait été faite [citoyenne] Romaine ou Latine – la comédienne ou la fille de comédienne, la cabaretière ou la fille de cabaretier, d'entremetteur, ou de gladiateur, ou la femme qui aurait conduit des transactions commerciales en public. C'est cela que, sans aucun doute, croyons-nous, Constantin de divine mémoire a entendu dans la constitution qu'il a promulguée et c'est pourquoi il a empêché les mariages de cette sorte, afin que les sénateurs ne se trouvent pas liés, moins à la compagnie conjugale, qu'aux vices de ces femmes que nous venons d'énumérer. 4. Quant aux autres dispositions de toute sorte qui ont été prises dans des constitutions sacrées, par Constantin d'illustre mémoire ou par d'autres divins princes après lui, sur les enfants naturels et leurs mères, et encore sur les concubines ingénues et sur celles qui se remarient après le décès de leur époux, nous ordonnons qu'elles soient inviolablement gardées : de telle manière, toutefois, que les constitutions postérieurement réalisées l'emportent en autorité sur les constitutions précédemment promulguées, et que tout ce qui en elles est postérieur dans le temps ait une valeur supérieure, ô Palladius, très cher et amé cousin. 5. Que ton Autorité illustre et magnifique fasse parvenir à tous notice de cette constitution de notre Sérénité destinée à valoir à toujours, en faisant afficher des textes de cet édit, selon l'usage. |
Donné
la veille des nones d'avril, à Constantinople, sous le consulat
d'Aetius et de Studius, « uiri clarissimi ». |
► Source : Leg. Nov. ad Theodos..., Marcianus, IV, 1-5. |