PROPOSITION DE LOI AGRAIRE
  
DU TRIBUN MARCUS MÉNÉNIUS
  
( 411 av. J.-C. )
 

     
Livius, IV, 53 ( Nisard, Paris, 1864 ).
  

 
1. Sous le consulat de Marcus Aemilius et de Gaius Valérius Potitus, les Èques commencèrent la guerre ; des Volsques, sans l'aveu de leur nation, avaient pris les armes, et suivaient les Èques comme volontaires et à leur solde. 2. Au bruit de leurs hostilités (car ils venaient de descendre sur le territoire des Latins et des Herniques), le consul Valérius voulut faire une levée ; mais, comme Marcus Ménénius, tribun du peuple, auteur d'un projet de loi agraire, s'opposait, et que, sous la protection de ce tribun, chacun refusait de prêter le serment, 3. on annonce tout à coup que la citadelle de Carventum est au pouvoir des ennemis. 4. Cet échec attira sur Ménénius la haine des patriciens, et donna aux autres tribuns, qu'on avait antérieurement décidés à s'opposer à la loi agraire, un plus juste motif de résister à leur collègue. 5. En conséquence, comme la querelle durait déjà depuis longtemps, et que les consuls prenaient à témoin les dieux et les hommes "que tout ce que l'ennemi avait apporté déjà ou pourrait apporter de désastre et d'opprobre retomberait sur la tête de Ménénius, qui empêchait les levées ;" 6. et comme, d'autre part, Ménénius répliquait avec force "que si les injustes détenteurs du bien public consentaient à s'en départir, il ne retarderait plus la levée ;" un décret intervint : les tribuns, pour mettre fin à ces débats, 7. prononcèrent, de l'avis du collège, "qu'ils prêteraient secours à Gaius Valérius, consul, dans toutes les mesures de force et de rigueur qu'il prendrait, pour combattre l'opposition de leur collègue, contre tous ceux qui, à l'occasion de la levée, voudraient se soustraire à l'enrôlement." 8. Lorsque, armé de ce décret, le consul eut saisi à la gorge quelques mutins qui en appelaient au tribun, les autres, effrayés, prêtèrent le serment.