ROGATIO LAELIA
   
VISANT À LIMITER LE DROIT D'« OCCUPATIO »
   
( 140 av. J.-C. )
 

     
Plutarch, Gr., 8 ( Ricard, Paris, 1840 ).
  

 
Les Romains, quand ils avaient conquis à la guerre des terres appartenant à des peuples voisins, en vendaient une partie et nationalisaient le reste, qu'ils donnaient à exploiter aux citoyens sans propriété et sans ressources, moyennant une faible redevance au profit du Trésor. Comme les riches offraient des redevances plus fortes et évinçaient ainsi les pauvres, on porta une loi qui ne permettait pas d'avoir plus de cinq cents arpents. Cette mesure mit un frein, pour un peu de temps, à l'avidité des riches et vint en aide aux pauvres qui pouvaient rester sur place, dans les propriétés qui leur étaient affermées et qu'ils exploitaient depuis le début. Plus tard leurs voisins riches se firent transférer les locations à ferme grâce à des prête-noms, et comme à la fin, ils occupaient ouvertement, par eux-mêmes, la plupart de ces biens, les pauvres, ainsi refoulés, ne se prêtaient plus avec zèle aux expéditions militaires et négligeaient même d'élever des enfants. Ainsi toute l'Italie ressentit bientôt la pénurie d'hommes libres et se remplit de prisonniers barbares, dont les riches se servaient pour labourer la terre à défaut de citoyens qu'ils en avaient chassés. Dans ces conditions Caius Lélius, l'ami intime de Scipion, entreprit de redresser la situation ; mais, se heurtant à l'opposition des puissants, il recula devant leurs protestations bruyantes et abandonna sa campagne. Il dut à cette volte-face la qualification de sage ou de prudent ; car tel est, semble-t-il, le double sens du mot sapiens.