LOIS VALERIAE HORATIAE
   
CONFIRMANT LES DROITS DE LA PLÉBE
  
( 449 av. J.-C. )


     
Livius, III, 55 Nisard, Paris, 1864 ).
  

 
1. Un interroi nomma ensuite les consuls Lucius Valérius et Marcus Horatius, lesquels entrèrent aussitôt en fonction. Ce consulat populaire ne lésait en rien les droits des patriciens, et fut cependant en butte à leur haine. 2. Tout ce qui se faisait pour la liberté du peuple leur semblait une usurpation sur leur puissance. 3. D'abord, il était un point de droit en contestation pour ainsi dire permanente : il s'agissait de décider si les patriciens étaient soumis aux plébiscites. Les consuls portèrent dans les comices par centuries une loi déclarant que les décisions du peuple assemblé par tribus lieraient tous les citoyens. On donnait ainsi aux tribuns l'arme la plus terrible. 4. Une autre loi, émanée des consuls, rétablit l'appel au peuple, unique soutien de la liberté. Mais ce n'était point assez ; on mit ce droit hors d'atteinte pour l'avenir, et une disposition nouvelle fit défense 5. de créer aucune magistrature sans appel, déclarant juste et légitime devant les dieux et devant les hommes le meurtre de l'infracteur, et à l'abri de toute recherche celui qui le commettrait. 6. Le sort des plébéiens était ainsi suffisamment assuré par l'appel au peuple et l'appui du tribunat ; mais les consuls, en faveur des tribuns eux-mêmes, et pour leur rendre une inviolabilité dont le souvenir s'était déjà presque effacé, firent revivre d'antiques cérémonies. 7. À la religion, qui les rendait sacrés, on joignit une loi portant que tout agresseur des tribuns du peuple, des édiles, des juges, des décemvirs, verrait sa tête dévouée aux dieux infernaux, et ses biens confisqués au profit du temple de Cérès, de Liber et de Libera. 8. Cette loi, selon les jurisconsultes, n'établissait d'inviolabilité en faveur de personne, mais dévouait seulement l'auteur de toute attaque contre ces magistrats. 9. Ainsi, l'édile peut être saisi et traîné en prison par ordre d'un magistrat supérieur. Bien que cette mesure soit illégale, puisqu'elle frappe un homme que protège cette loi, cela prouve cependant que l'édile n'est point inviolable ; 10. les tribuns l'étaient, au contraire, en vertu de l'antique serment du peuple, lors de la création de cette puissance. 11. On a prétendu quelquefois que cette même loi Horatia place également sous sa sauvegarde les consuls, ainsi que les préteurs créés sous les mêmes auspices qu'eux ; que le juge c'est le consul. 12. Il est facile de réfuter cette interprétation ; en effet, à cette époque ce n'était pas au consul, mais bien au préteur que l'usage donnait le nom de juge. Telles furent les lois que portèrent les consuls. 13. Ils ordonnèrent de plus qu'on remît dans le temple de Cérès, à la garde des édiles plébéiens, les sénatus-consultes que les consuls supprimaient jadis ou altéraient à leur gré.