RESCRIT
DE GRATIEN, VALENTINIEN ET THÉODOSE, SUR
LES HÉRÉTIQUES |
( E. Magnou-Nortier, Le Code Théodosien. Livre XVI, Paris, 2002, pp. 202-207 ). |
Les
empereurs Gratien, Valentinien et Théodose, à Eutrope,
préfet du prétoire. |
Si,
depuis le jour récent où une première loi a été
promulguée par Nos parents, quelque manichéen ou manichéenne
a transmis ses biens personnels à quiconque par un testament
en bonne et due forme, ou au titre de quelque libéralité
et en guise de don, ou encore si quelqu'un d'entre eux a vu ses richesses
s'accroître grâce à une succession à lui conférée
et par lui acceptée sous quelque forme que ce soit, étant
donné que Nous avons, par une note d'infamie imprimée
à perpétuité, arraché à ces gens
la faculté de tester et de vivre selon le droit romain, et que
Nous ne leur permettons pas d'avoir la capacité de laisser ou
de recevoir quoi que ce soit par voie d'héritage, qu'après
enquête le tout soit obligatoirement réuni à la
masse de Notre fisc. Si une succession, provenant d'une libéralité
illégale, doit être à l'avantage d'un mari, d'un
proche, de quelqu'un qui a rendu des services, ou même d'enfants,
mais qui se trouvent étroitement liés aux forfaits de
la vie criminelle du testateur, ou si elle doit profiter, par l'intermédiaire
d'une tierce personne, à quelque membre du troupeau d'une telle
engeance humaine, qu'elle soit confisquée au titre des biens
caducs. Que les dispositions de cette loi promulguée par Notre mansuétude ne soient pas seulement valables pour l'avenir, mais aussi pour le passé ; que toutes les propriétés léguées ou reçues en héritage par de telles personnes soient réclamées au nom de la revendication ( usurpatio ) du fisc. De fait, quoique la règle des décisions célestes veuille que l'observance d'une constitution sacrée s'applique seulement aux faits qui lui sont postérieurs, et qu'elle n'ait point pour coutume de s'appliquer aux faits antérieurs, cependant, parce qu'un acharnement invétéré et une nature obstinée le méritent, nous l'admettons uniquement pour cette loi, que Nous voulons avoir une force toute particulière, avec le sentiment de mener une juste poursuite. Et ceux aussi qui, après la promulgation de la loi précédente, n'ont pu être détournés en aucune manière de tenir des assemblées illégales et profanes, malgré cet avertissement divin, Nous les tenons pour coupables de sacrilège, pour violateurs de la loi susdite. La sévérité des présents statuts que nous avons décrétés ne vise pas à faire un exemple dans l'établissement d'une loi, mais dans la punition des transgressions d'une loi, de façon que le temps écoulé ne soit pas une protection pour les transgresseurs. La succession des biens paternels et maternels ne sera déférée qu'à ces enfants qui, nés de parents manichéens, mais avertis par le sentiment et le souci de leur propre salut, se seront détournés des associations où l'on mène ce genre de vie avec cette profession de foi, se seront convertis à la vraie foi, et seront exempts d'un tel crime. Nous ajoutons à la sanction de cette loi : – qu'ils n'établissent pas les monuments funèbres habituels de leurs lugubres mystères ni dans les lieux de réunion des agglomérations, ni dans les grandes cités ; – qu'ils se maintiennent en dehors de la vue dans les métropoles ; – que, par une fraude maligne, ils ne se défendent pas en se cachant sous des noms trompeurs dont beaucoup, à notre connaissance, veulent se faire appeler et désigner comme s'ils avaient une foi éprouvée et une morale plus pure. En particulier certains d'entre eux veulent se faire appeler encratites, apotactites, hydroparastates ou saccophores pour feindre les obligations de la profession religieuse par la variété de ces divers noms. Il convient donc que la profession de ces noms ne protège aucun d'eux, mais qu'ils soient notés d'infamie et exécrables en raison du crime d'appartenance aux sectes. |
Donnée
le 8 des ides de mai, à Constantinople, sous le consulat d'Eucherius
et de Syagrius. |
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