SÉNATUS-CONSULTE CLAUDIEN
  
CONCERNANT L'UNION ENTRE UNE FEMME LIBRE ET UN ESCLAVE
  
( 52 apr. J.-C. )
 

     
Code de Justinien, VII, 24 ( Tissot, Metz, 1811 ).
  

 
Croyant indigne de notre règne, pendant lequel nous n'avons cessé de favoriser la liberté, que des femmes libres soient privées de la liberté, et qu'il résulte du libertinage des hommes corrompus un effet qui n'a pu être produit par la férocité des ennemis que contre le droit naturel, nous voulons que le sénatus-consulte Claudien soit abrogé pour l'avenir, et qu'il ne soit même donné aucune suite aux dénonciations et aux sentences déjà rendues à ce sujet. Que désormais donc une femme libre, mais abusée une fois ou entraînée par un amour malheureux, ne soit pas pour de telles causes ou toutes autres, privée de son ingénuité natale, pour être plongée dans la servitude, et n'obscurcisse pas ainsi l'éclat de sa famille par la plus vile des conditions. Car il pourrait même arriver qu'une telle femme eût des parents élevés à des dignités respectables, et un maître peut-être inférieur à ses parents. Ces dispositions doivent être également appliquées aux affranchis. Les mœurs de mon règne ne doivent souffrir en aucune manière que la femme qui a reçu une fois la liberté, retombe par une telle cause dans la servitude. Nous ordonnons cependant, pour que les esclaves et les ascrits ne croyent pas commettre impunément de tels attentats ( surtout pour ce qui concerne les ascrits, afin qu'ils ne changent peu à peu leur condition en se mariant avec des personnes libres ) ; nous ordonnons que lorsqu'un esclave ou l'ascrit qui sera convaincu d'un tel attentat, son maître ait le plein droit de le corriger par un châtiment convenable, soit par lui-même.
 

 
Institutes de Justinien, III, 12 ( Ortolan, Paris, 1857 ).
  

 
1. Il y avait encore, en vertu du sénatus-consulte Claudien, une misérable acquisition par universalité, lorsqu'une femme libre, abandonnée sans frein à un amour servile, perdait, en vertu de ce sénatus-consulte, sa liberté, et avec elle sa fortune. Disposition que nous n'avons pas permis d'insérer dans notre Digeste, la considérant comme indigne de notre siècle, et comme devant être abolie dans nos États.
 

     
Gaius, Institutes, I ( Reinach, Paris, 1965 ).
  

 
84. Voici en effet une citoyenne romaine qui s'est unie avec l'esclave d'autrui, du consentement de son maître : elle pouvait, de convention expresse, en vertu du sénatus-consulte Claudien, demeurer libre mais enfanter un esclave, car le sénatus-consulte déclare valable la convention intervenue entre la femme et le maître de cet esclave. Mais ultérieurement le divin Hadrien, ému de l'injustice de la chose et de l'inélégance de cette solution en droit, rétablit la règle du droit des gens, afin que du moment que la femme reste libre, elle donne le jour à un enfant libre. 85. ..... d'une femme esclave et d'un homme libre pouvaient naître des enfants libres. Car il est établi par cette loi que si l'on s'est uni avec une esclave d'autrui qu'on croyait libre, les garçons qui viendraient à naître seraient libres, tandis que les filles appartiendraient au maître de la mère. Mais, dans cette espèce également, le divin Vespasien, ému par l'inélégance de la solution, rétablit la règle du droit des gens en sorte que dans tous les cas, même s'il s'agit de garçons, les enfants naquissent esclaves du maître de la mère. 86. Mais une partie de la loi reste en vigueur, celle d'après laquelle les enfants de la femme libre et de l'esclave d'autrui, dont elle connaissait l'état, naissent esclaves. Aussi chez ceux qui n'observent pas cette loi, l'enfant suit-il l'état de sa mère selon le droit des gens, et par suite naît libre.
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91. De même, si une citoyenne romaine enceinte est réduite en servitude en vertu du sénatus-consulte Claudien pour s'être unie à l'esclave d'autrui contre le gré du maître et nonobstant ses avertissements, beaucoup d'auteurs distinguent et estiment que l'enfant conçu d'un mariage légitime naît citoyen romain, tandis que l'enfant conçu hors mariage naît esclave du même maître que sa mère.
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160. Il y a grande diminution de capacité quand on perd à la fois la nationalité et la liberté, ce qui se produit pour les non-recensés que l'ordonnance sur le recensement déclare devoir être vendus, ce droit. . . par la loi. . . qui en violation de cette loi ont conservé leur domicile à Rome ; de même les femmes qui en vertu du sénatus-consulte Claudien deviennent les esclaves des maîtres des esclaves avec lesquels, contre le gré de ces maîtres et nonobstant leurs avertissements, elles se sont unies.

 
Sentences de Paul, II, 21a ( Daubanton, Metz, 1811 ).
  

 
Des femmes qui se seraient unies aux esclaves d'autrui, et du sénatus-consulte Claudien. — 1. Si une femme de condition libre, citoyenne Romaine ou Latine, s'était unie à l'esclave d'un autre ; si, contre la volonté du maître de cet esclave, ou malgré la dénonciation de ce maître, elle s'obstine à continuer à cohabiter avec l'esclave, elle devient elle-même servante. 2. Si une femme de condition libre s'unit avec l'esclave d'un pupille, et qu'elle soit dénoncée par le tuteur, elle devient servante. 3. La femme qui néanmoins se sera jointe à l'esclave de celui-ci, devient sa servante s'il la dénonce. 4. Le fondé de pouvoir, le fils de famille, ou l'esclave qui dénoncent une femme ( dans tous les cas ci-dessus ) de l'ordre du père ou du maître, la constituent en esclavage. 5. Si une femme libre s'est unie à l'esclave péculiaire d'un fils de famille, elle devient l'esclave de ce fils de famille, son droit à cet égard n'a pas besoin d'être confirmé par le consentement de son père. 6. L'affranchie qui, au su de son patron, cohabite avec l'esclave d'un autre, devient l'esclave de celui qui la dénonce. 7. L'affranchie qui, à l'insu de son patron, se sera unie à l'esclave d'un autre, redevient l'esclave de son patron, sous la condition cependant que jamais il ne la ramenera à Rome. 8. Femme de condition libre qui se sera unie avec l'esclave de pécule militaire d'un fils de famille, devient l'esclave de celui-ci s'il l'a dénoncée. 9. Fille de famille qui, contre le gré ou à l'insu de son père, se sera unie à l'esclave d'un autre, et aura été dénoncée, n'en retiendra pas moins son état ; parce que la condition des péres ne peut devenir pire par le fait des enfants. 10. Fille de famille qui, de l'ordre de son père, aura cohabité avec l'esclave d'un autre, et aura continué cette cohabitation malgré la défense du maître de cet esclave, devient elle-même esclave ; parce que les pères ont le droit de rendre pire la condition de leurs enfants. 11. L'affranchie qui aura persisté dans sa cohabitation avec l'esclave de son maître, après avoir été dénoncée, restera dans son état ; parce qu'elle sera censée n'avoir pas voulu abandonner la maison de son patron. 12. Celle qui se croyant servante, se sera pour cela unie à l'esclave d'autrui, et qui, instruite ensuite qu'elle est libre, aura continué sa cohabitation avec cet esclave, redevient esclave. 13. Si la patronne d'un affranchi s'est unie a l'un des esclaves de celui-ci, quoique dénoncée, il est de droit ancien qu'elle ne peut devenir esclave. 14. Femme de condition libre qui se sera unie à l'esclave d'un jouissant du droit de bourgeoisie, le connaissant bien pour tel, deviendra esclave quand même elle n'aurait pas été dénoncée. Il en sera autrement si elle ignorait sa condition. Elle sera censée avoir ignoré la condition de cet esclave si, en ayant été informée, elle a cessé de cohabiter avec lui, ou si elle l'a cru affranchi. 15. Femme libre qui a cohabité avec un esclave qui a eu plusieurs maîtres, devient l'esclave de celui qui la dénonce le premier, à moins qu'elle ne l'ait été par tous. 16. Si une mère s'est unie à l'esclave de son fils, le sénatus-consulte Claudien, quant à ce fait honteux de la mère, n'exige pas un respect dont on aurait à rougir. Il en est, dans ce cas , ainsi que de celle qui s'est unie à l'esclave de son affranchi. 17. Celle qui aurait même été dénoncée par trois fois, et paraîtrait avoir été réduite à la condition d'esclave, ne sera censée avoir été adjugée à un maître que de l'autorité d'un jugement exprés rendu par le gouverneur de la province. Celui qui peut donner la liberté, a aussi seul le droit de l'ôter. 18. La fille de famille qui, après la mort de son père, aura continué à vivre avec un esclave ; convaincue de ce fait dans la forme du sénatus-consulte Claudien, devient esclave.
 

 
Sentences de Paul, IV, 10 ( Daubanton, Metz, 1811 ).
  

 
2. Succession de mère n'est pas légitime, quant à la fille servante ou affranchie en vertu du sénatus-consulte Claudien ; parce que ni les esclaves, ni les affranchis n'ont aucunes mères civilement reconnues.
 

 
Règles d'Ulpien, XI, 11 ( Daubanton, Metz, 1811 ).
  

 
Il y a perte totale d'état civil, lorsqu'on perd la liberté et le droit de cité. C'est ce qui arrive, lorsque l'on est supprimé du cens, ou lorsqu'une femme libre a été dénoncée par le maître d'un esclave qu'elle aurait épousé, et devient esclave, d'après le sénatus-consulte Claudien.
 

 
Tacitus, Annales, XII, 53 ( Grimal, Paris, 1990 ).
  

 
Sur ce, il ( = l'empereur Claude ) fait un rapport aux Pères sur le châtiment des femmes qui auraient une liaison avec des esclaves ; et l'on décide que, si elle s'était ainsi avilie à l'insu du maître, la femme coupable serait considérée comme esclave, s'il avait donné son accord, elle serait considérée comme libre.