RESCRIT DE JUSTINIEN RÉFORMANT L'USUCAPION
  
( 531 apr. J.-C. )
 

 
A. Levet, E. Perrot & A. Fliniaux, Textes et documents.., Paris, 1931, pp. 46-48, n. 49 ).
 

 
Attendu que nos soins ont déjà fait disparaître le nom et la substance du dominium ex jure Quiritium, et aussi étendu en tout lieu l'usage de prescriptions, soit celles de dix, de vingt et de trente ans, soit celles qui renferment un plus long délai, il est bien inutile de n'admettre l'usucapion que pour les choses situées en Italie, et de l'exclure pour les choses situées dans les provinces. Mais lorsque quelqu'un possédait pendant deux ans une chose appartenant à autrui, italique toutefois, le malheureux propriétaire était écarté, sans avoir aucun moyen de recouvrer sa chose ; et cela se réalisait à l'insu même du propriétaire. Il n'y avait rien de plus inhumain que de le dessaisir de ses propriétés, à son insu et en son absence, au bout d'un aussi court laps de temps. 1. C'est pourquoi, par la présente constitution, nous décrétons, à l'égard des immeubles et autres choses réputées tels, situés en Italie, que l'usucapion soit transformée, de même que déjà nous avons transformé l'exception annale, en sorte que seuls pourront courir les délais des exceptions de dix, ou de vingt, ou de trente ans, ou les délais des autres exceptions et que le susdit court délai sera écarté complètement. 2. A l'égard des biens meubles ou se mouvant d'eux-mêmes, aliénés ou possédés à un titre quelconque, pourvu que ce fût de bonne foi, les anciens prolongeaient l'usucapion, qu'ils enfermaient dans le délai d'un an, dans l'univers entier, sans la lier à l'Italie. Nous avons jugé devoir y apporter la modification suivante : si quelqu'un a possédé de bonne foi pendant trois ans continus, sur un territoire quelconque, italique ou provincial, une chose mobilière ou se mouvant d'elle-même appartenant à autrui, il la possédera d'un droit inexpugnable, comme s'il l'avait acquise par l'usucapion. 3. Remarquons seulement que, dans tous ces cas, la possession devra être commencée avec bonne foi, conformément à ce qu'exige la prescription de long temps ; que le possesseur actuel continuera la juste possession d'un possesseur antérieur, possession qui sera comptée dans le délai de dix ou vingt ans, ou dans celui de trois ans que nous imposons pour les meubles ; que la juste possession du prédécesseur, fondée sur un juste titre, ne sera pas interrompue par la connaissance qu'on pourrait avoir postérieurement que la chose appartient à autrui, bien que cette possession ait commencé à titre lucratif... 5. Et comme la distinction des choses en rex mancipi et nec mancipi est bien ancienne, qu'il convient à juste titre de l'abroger, que toutes les choses et tous les lieux soient soumis à la même règle, et que toutes ces obscurités et distinctions inutiles disparaissent.
 

  
►  
Source : Code de Justinien, VII, 31, 1.