ULPIEN : LE RÉGIME DOTAL
 
 
( IIIe s. apr. J.-C. )
 

 
J. Gaudemet, Droit privé romain, 2e éd., Paris, 2000, pp. 336-337, n. 44 ).
 

      La dot est constituée par un transfert, par une dictio ou par promesse. La dotis dictio ne peut émaner que de la femme qui va se marier ou de son débiteur, s'il s'engage sur son ordre : ainsi que d'un ascendant mâle de la femme, lié à elle par les mâles, tel que son père ou son grand-père paternel. Constituer la dot par transfert ou par promesse est possible à toute personne. La dot est appelée « profectice », lorsqu'elle est constituée par le père de la femme, ou « adventice », lorsqu'elle est constituée par toute autre personne. Si la femme meurt au cours du mariage, la dot constituée par le père revient au père, un cinquième de la dot par enfant, sans maximum, restant au mari. Si le père est prédécédé, la dot reste au mari. La dot adventice reste toujours acquise au mari, sauf si le constituant a stipulé qu'elle lui serait rendue : cette dot est alors appelée « réceptice. »
      En cas de divorce, si la femme est maîtresse de ses droits, c'est elle qui a l'action « pour le patrimoine de la femme », c'est-à-dire l'action qui lui permet de recouvrer la dot. Si elle est sous la puissance de son père, celui-ci, avec le concours de sa fille, a l'action pour le patrimoine de la femme, et peu importe que la dot soit adventice ou profectice. Après décès de la femme divorcée, l'action n'est donnée à son héritier que si le mari avait préalablement été mis en demeure de rendre la dot de sa femme. Si la dot comprend des choses qui se pèsent, se comptent ou se mesurent, elle est restituée en trois annuités . Les autres dots doivent être rendues immédiatement. Des rétentions dotales ont lieu en considération des enfants, en raison des mœurs de la femme, des impenses, des donations ou de choses enlevées par la femme. La rétention en raison des enfants a lieu si le divorce est imputable à la faute de la femme ou de celui sous la puissance paternelle de qui elle se trouve. Dans ce cas on retient, sur la dot, un sixième par enfant, avec un maximum de trois [enfants pris en compte]. Les sixièmes peuvent être déduits de la restitution, mais non réclamés.
      Au titre de fautes morales graves, la rétention est du sixième ; en cas de fautes légères du huitième. Seule est faute grave l'adultère ; toutes les autres fautes sont tenues pour légères. Les mauvaises mœurs du mari sont punies également sur la dot, qu'il doit rendre dans un certain délai ; de telle façon qu'en cas de faute grave, il doit la rendre immédiatement, en cas de faute légère dans les six mois.
      Il y a trois variétés d'impenses : elles sont appelées nécessaires, utiles, voluptaires. Les impenses nécessaires sont celles qui, si elles n'étaient pas faites, entraîneraient une dégradation de la dot, telles que la réparation d'une maison qui menace ruine. Les impenses utiles sont celles qui, si elles n'ont pas lieu, n'entraînent pas diminution de la valeur de la dot, mais qui, par leur accomplissement, la rendent plus fructueuse, telles que la plantation de vignes ou d'oliviers. Les impenses voluptaires sont celles dont l'absence n'entraîne pas de diminution de la dot et dont l'accomplissement ne la rend pas plus prospère : par exemple celle pour l'installation de bassins ou de décoration de peintures et d'autres choses du même ordre.


 
►  Source : Règles d'Ulpien, VI, 1-17.