GAIUS :
LE « SACRAMENTUM » ( 161-162 apr J.-C. ) |
( J. Imbert in Histoire des Institutions.., Paris, 1957, pp. 162-163, n. 90 ). |
13. L'action
du sacramentum était générale ; en
effet pour les affaires au sujet desquelles la loi n'avait pas prescrit
d'agir autrement, on agissait par le sacramentum. Cette action
était aussi périlleuse au cas de mensonge que l'est aujourd'hui
l'action certae creditae pecuniae en raison de la promesse
par laquelle est tenu le défendeur s'il nie témérairement
et de la contrepromesse par laquelle est tenu le demandeur s'il réclame
ce qui ne lui est pas dû. En effet celui qui perdait abandonnait
le montant du sacramentum à titre de peine, somme qui
tombait dans le trésor public. Des cautions étaient données
à ce titre au préteur. Ce n'était pas comme maintenant,
où la peine de la promesse et de la contrepromesse bénéficie
à l'adversaire qui a gain de cause. 14. La
pénalité du sacramentum était de 500 ou
de 50 ( as ) ; on plaidait sur 500 as pour les affaires
de mille as et plus ; sur 50 as pour les affaires moindres ;
c'était ainsi que la loi des XII Tables l'avait prescrit. Mais
si le débat portait sur la liberté d'un homme, même
si c'était un homme de très grand prix, on ne plaidait
que sur un sacramentum de 50 as, ainsi que la même loi l'avait
prescrit, évidemment par faveur pour la liberté, afin
que les adsertores ne soient pas trop grevés ... |
15. ...
A la suite d'un délai de trente jours, un juge était donné,
comme l'a prévu la loi Pinaria ; avant cette loi, aussitôt
on donnait un juge. D'après ce qui a été dit plus
haut, on comprend que si l'affaire était inférieure à
1 000 as, on plaidait ordinairement par un sacramentum de 50,
non de 500 as. Cependant, une fois le juge donné, les parties
s'assignaient mutuellement au surlendemain pour se présenter
devant lui. Ensuite, lorsqu'ils comparaissaient devant le juge, avant
d'exposer devant lui la cause en entier, ils avaient l'habitude d'exposer
l'affaire brièvement et comme en un sommaire ; on appelait
cela collectio de la cause, comme étant un bref résumé
de sa cause. |
16. Si
l'on agissait in rem, les meubles et les objets mobiles, du
moins ceux qui pouvaient être portés ou amenés devant
le magistrat, étaient revendiqués in iure de
la manière suivante. Celui qui revendiquait tenait une baguette,
ensuite saisissait l'objet lui-même, par exemple un homme et disait :
« J'affirme que cet homme est mien en vertu du droit des
Quirites, selon sa causa ( condition ? ), ainsi
que je l'ai dit, voici que sur toi j'ai posé ma vindicta. »
Et, en même temps, il posait sa baguette sur l'homme. L'adversaire
disait et agissait de même. Lorsque chacun avait revendiqué,
le préteur disait : « Lâchez tous deux
l'homme. » Ceux-ci le lâchaient. Celui qui avait le
premier revendiqué disait alors : « Je te demande
de dire à quel titre tu as revendiqué. » Ce
dernier répondait : « J'ai agi à bon droit
en imposant ma vindicta. » Ensuite, celui qui le
premier avait revendiqué disait : « Comme tu
as revendiqué à tort, je te provoque au sacramentum
de 500 as d'airain » ; l'adversaire disait à
son tour : « Et moi aussi. » ( Ou si
l'affaire était de moins de mille as, c'est à 50 as qu'ils
en chiffraient le montant. ) C'étaient alors les mêmes
formalités que dans le sacramentum in personam ;
puis le préteur prononçait les vindiciae au profit
de l'un d'eux, c'est-à-dire constituait provisoirement l'un possesseur
et lui ordonnait de fournir à l'adversaire une caution pour le
procès et les vindiciae ( c'est-à-dire la
chose et ses fruits ). Le préteur lui-même recevait
d'autres cautions de chacun des plaideurs au titre du sacramentum,
parce que celui-ci tombait dans le trésor public. Les baguettes
étaient employées en guise de lance, comme en symbole
de propriété légitime, puisqu'on croyait que la
propriété légitime la mieux établie était
celle du butin pris à l'ennemi : c'est la raison pour laquelle
une lance est placée devant le tribunal des centumvirs. |
17. Si
la chose était telle qu'elle ne pût être sans inconvénients
apportée ou amenée en justice, par exemple si c'était
une colonne ou un navire ou un troupeau de bétail, on en prenait
une partie et on l'amenait en justice et la vindicatio se faisait
sur cette partie comme si la chose entière eût été
présente. Ainsi, d'un troupeau, soit une brebis ou une chèvre
était conduite en justice soit même du poil en était
prélevé et apporté en justice ; d'un navire
ou d'une colonne, on détachait quelque partie. De même
si le débat portait sur un fonds de terre ou une maison ou une
hérédité, on en prenait une partie pour l'apporter
en justice et la vindicatio se faisait sur cette partie comme
si la chose tout entière eût été présente :
par exemple pour un fonds, on prélevait une motte de terre ;
pour une maison, une tuile ; et si le débat portait sur
une hérédité également... |
► Source : Gaius, Institutes, IV. |