ULPIEN : VOL D'UNE LETTRE
 
 
( IIIe s. apr. J.-C. )
 

 
J. Gaudemet, Droit privé romain, 2e éd., Paris, 2000, p. 395, n. 154 ).
 

Si la lettre que je t'ai envoyée a été interceptée, qui aura l'action de vol ? Et d'abord il faut rechercher à qui appartient la lettre, à celui qui l'a envoyée ou à celui à qui elle a été envoyée ? Si je l'ai donnée à son esclave, elle est aussitôt acquise à celui à qui elle est adressée ; si je l'ai remise à son fondé de pouvoir, la lettre lui est également acquise ( parce que l'on peut par une personne libre acquérir la possession ), surtout s'il avait intérêt à l'avoir. Si j'ai envoyé la lettre à condition qu'elle me fût restituée, elle reste ma propriété, parce que je n'ai pas voulu en perdre ou en transférer la propriété. Qui donc aura l'action de vol ? Celui qui avait intérêt à ce que la lettre ne soit pas soustraite, c'est-à-dire celui pour qui l'écrit présentait une utilité. C'est pourquoi on peut demander si celui à qui elle avait été remise pour être portée peut aussi avoir l'action de vol. Si la garde de cette lettre lui incombait, il le peut ; et s'il avait intérêt à rendre cette lettre, il aura l'action de vol. Supposez qu'il s'agisse d'une lettre contenant une disposition qui prescrivait de rendre au porteur quelque chose ou de faire quelque chose à son profit ; il peut avoir l'action de vol. Ou bien, s'il a reçu la garde de cette chose, ou s'il a reçu un salaire pour la porter. Et dans ce cas, la situation est semblable à celle d'un hôtelier ou d'un patron de navire ; car nous leur donnons l'action de vol parce que la perte des choses est à leur charge.


 
►  Sources : Ulpien, Commentaire sur Sabinus, L. 29 = Digeste, XLVII, 2, 14, 17.