LOI ROMAINE DE DELPHES
  
( 101-100 av. J.-C. )

 


 
( G. Colin, Bulletin de Correspondance Hellénique, 48, 1924, pp. 83-95 ).
 

 
     . . . – Que le consul qui  ouvrira  l'année  envoie à tous les peuples [amis et alliés du peuple romain des lettres, où il leur recommandera de faire en sorte] que nos négociants, citoyens romains de plein droit ou habitants des villes fédérées d'Italie vivant sous le régime du droit latin puissent, [suivant leurs besoins, exercer leur commerce dans les villes et les îles de l'Orient et] naviguer en sécurité sur la mer ; ce sont là précisément les raisons pour lesquelles [le préteur M. Antonins a occupé] la Cilicie [et l'a placée sous notre domination. De même, en écrivant] au roi régnant dans l'île de Chypre, au roi régnant à Alexandrie et en Egypte, [au roi régnant à] Cyrène, et aux rois régnant en Syrie, [tous] amis et alliés [du peuple romain, qu'il leur représente] également qu'il est juste de leur part de prendre garde [qu'il ne parte] aucun pirate de leur royaume, de leur territoire ou de leurs frontières, [ou que les magistrats et commandants de places qu'ils] institueront ne donnent asile aux pirates, et de veiller, autant qu'il est en eux, à ce que le peuple romain, [travaillant pour le salut commun, trouve des concours dévoués. Qu'il remette] les lettres adressées aux rois en exécution de la présente loi aux députés des [Rhodiens, qui sont sur le point de retourner dans leur patrie].
     [Que  le  consul]  dont c'est la charge pourvoie à leur sécurité [conformément aux lois et aux usages] réguliers. [Au cas où, par la suite, quelqu'un des alliés] constituerait [des ambassades], et où il serait nécessaire de prendre des résolutions, que (le consul) fasse de même un rapport préliminaire au Sénat ; que le Sénat en délibère [comme il lui semblera bon d'après l'intérêt Public] et sa conviction personnelle; et, dès que sur cette affaire le Sénat aura rendu un décret, que tout magistrat ou promagistrat [s'emploie et donne tout son soin, dans le sentiment de son devoir], à en assurer l'exécution.
     Que  le  consul  à qui incombera le soin de [communiquer] aux ambassades ( étrangères ) [les décisions du Sénat] obtienne [pour les députés] du peuple rhodien qui se trouveront à Rome une audience du Sénat en dehors du tour ordinaire ; que, [sans admettre aucun faux-fuyant], il introduise ces [députés] en dehors de leur tour dans le Sénat ; et qu'il veille à ce qu'il y ait un décret du Sénat [résolvant la question une fois que, en vertu] d'une loi ou d'un plébiscite, il aura introduit [les députés] ; le tout, sans encourir aucune pénalité.
     Que  les  gouverneurs  [autres que des consuls qui seront désignés pour la Macédoine et] l'Asie [à moins que] C. Marius et L. Valérius n'aient [ces contrées] pour provinces [envoient] des lettres aux peuples [amis et alliés, ainsi] qu'aux rois énumérés plus haut, et semblablement [à tous ceux auxquels] le consul, en exécution de cette loi et [dans la conscience de son devoir, aura jugé convenable] d'écrire. [Qu'en même temps] ils adressent une copie de la présente loi aux villes et aux Etats auxquels il faut en adresser d'après cette loi, [en veillant et en faisant attention, autant qu'il] est en leur pouvoir, à ce que toute lettre expédiée par eux d'après cette loi à n'importe qui soit bien remise conformément à cette loi. [Alors, suivant les habitudes de chaque pays], partout où des lettres auront été envoyées d'après cette loi, que ces lettres soient gravées sur une table de bronze; [ou, à défaut, qu'elles soient transcrites] sur un tableau blanc, afin que, dans les villes, elles [soient exposées dans un sanctuaire] ou sur une place publique, en évidence, à un endroit où le public puisse s'arrêter pour les lire [commodément en y abordant de plain-pied. De toute façon,] les lettres (des préteurs) devront avoir pour résultat que [. . .], parmi les magistrats placés sous leur dépendance, tous ceux qui ont à faire quelque chose d'après cette loi veillent [ . . . à en assurer l'exécution].
     Que  [nos]  gouverneurs,  [consuls ou autres] magistrats, qui, conformément à cette loi, que ce soit un plébiscite [ou une loi], auront, [dans les années suivantes], leur province en Macédoine, [ . . . se rendent sans tarder dans la] Thrace, que T. Didius vient de soumettre pendant son année de comman. dement. [Qu'ils s'inspirent des dispositions] ci-dessus ; [qu'ils organisent] cette province ; qu'ils veillent d'après le sentiment de leur devoir, à ce que, percevant les revenus publics [de toute la province, ils les aient à leur dispo. sition pour s'en servir suivant] les besoins ; et que, chaque année, pendant une durée d'au moins six jours, [ils y fassent une tournée. . .] avant [. . .], autant que possible, afin de [connaître] par eux-mêmes tous ceux [qu'il convient de regarder comme rattachés] à la république [romaine. . .
( plusieurs lignes sont illisibles )
     Que  les  questeurs  qui auront [pour provinces] l'Asie et la Macédoine s'occupent [avec grand soin] de l'argent de l'Etat ; qu'ils frappent d'amende [toute infraction commise] pendant la période de leur administration; et qu'ils soient inattaquables jusqu'à leur retour à Rome [et la reddition de leurs comptes] dans le S[énat. De cette façon], tout ce qu'ils ont à faire d'après cette loi, qu'ils le fassent ; et que personne, ni magistrat [ni promagistrat, ne leur oppose une intercession capable, là où les choses] doivent se passer conformément à cette loi, d'empêcher [l'exécution de ses prescriptions].
     Que  les  gouverneurs,  [consuls ou autres magistrats, qui] auront pour provinces l'Asie ou la Macédoine, jurent, dans les dix premiers jours où ils auront appris [la ratification de] cette loi [par le peuple] assemblé, de faire tout ce qu'il est ordonné de faire dans cette loi, et de ne rien faire qui y soit contraire, sans admission d'aucune fraude coupable.
     Que  les  magistrats  actuellement en charge, à l'exception des tribuns et des gouverneurs de provinces, [prêtent serment] dans les cinq [premiers] jours qui suivront la ratification de cette loi par le peuple ; et ceux qui recevront leur charge plus tard, à l'exception des gouverneurs, dans les cinq jours qui suivront immédiatement leur entrée en charge ; ( cela s'entend du moins de ceux qui sont à Rome ). Qu'ils jurent par Jupiter et par les dieux Pénates de faire tout ce qui est stipulé dans cette loi, et de veiller à son exécution ; de ne rien faire de contraire à la loi, ni rien qui entraîne un autre à contrevenir, ni rien non plus qui produise un résultat différent des prescriptions de la loi.
     Que  personne  n'agisse  contrairement à cette loi, sans admission d'aucune fraude coupable. Ce que chacun doit faire conformément à cette loi, faites-le. Que personne ne fasse rien qui aboutisse par un moyen détourné à abroger la loi, sans admission d'aucune fraude coupable. Que, par aucun acte, par aucune décision, on n'empêche de s'exécuter tout ce qui doit se faire d'après la loi, et que ceux qui ont à agir ou à prêter serment agissent et prêtent serment en vue d'empêcher soit l'abolition, soit encore l'altération des prescriptions de cette loi. Pour celui qui commettra un acte ou prendra une décision contraire à cette loi, quels que soient de sa part l'acte ou le serment non conformes à cette loi, qu'il lui soit impossible d'échapper à une condamnation, et que rien n'empêche le premier venu de le poursuivre en justice.
     Si  quelqu'un  commet  une contravention quelconque à cette loi, soit que, étant de ceux qui ont quelque chose à faire conformément à cette loi, il ne le fasse pas et ne prête pas serment, soit qu'il commette un acte constituant une atténuation de cette loi, ou encore qu'en opposition avec le texte de cette loi il commette un acte, prenne une décision ou se rende coupable d'une contravention par fraude coupable : qu'il soit condamné à 200 000 sesterces d'amende pour chaque espèce de contravention. Si donc il s'est abstenu de faire certaines choses en s'écartant du texte de cette loi, et quel que soit le cas où il se sera écarté des stipulations de la loi, qu'il soit tenu de payer au peuple la somme indiquée. Ces sommes, que le premier venu, pourvu qu'il soit citoyen libre de notre république, ait le droit de les réclamer et d'intenter un procès à toute personne vis-à-vis de qui il y aura lieu de le faire ; qu'il ouvre une action, introduise l'instance et dénonce le nom du coupable à l'autorité compétente ; que personne, magistrat ou promagistrat, ne mette obstacle au procès, et n'empêche cet argent de faire l'objet d'une contestation et d'une revendication, le jugement d'être rendu, et les sommes dues d'être versées. Quiconque aura commis un acte, formé une opposition ou pris une décision contraire à ces prescriptions sera condamné dans chaque cas tout comme s'il avait fait quelque chose de contraire à la loi, ou comme si, ayant quelque chose à faire d'après cette loi, il s'en était abstenu ; la peine sera celle qui a été prescrite pour les cas précédents.
     Pour  les  sommes  qui seront réclamées en exécution de cette loi, si, quel que soit le moment, quel que soit le motif de la réclamation, elles ne sont pas [payées, que le même] préteur au tribunal duquel l'affaire aura été portée [rende aussi], autant qu'[il lui semblera bon, un second] arrêt, [portant que] celui à qui l'argent aura été réclamé d'après cette loi [est tenu de s'acquitter intégralement] envers le peuple [sans délai ; ] et que le débiteur [. . . . . . .
 


 
►  Source : Inscription découverte sur le monument de Paul-Emile, à Delphes, entre 1893 et 1896.